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Internet et la littérature : et si on réapprenait à lire ?



Une histoire de chiffres


Entre la France et la lecture, c’est une longue histoire d’amour. Placé dans le top 15 des pays qui lisent le plus selon le site Global English Editing, les Français passent environs sept heures à lire par semaine. La littérature demeure aujourd’hui le domaine culturel le plus rentable, devant le cinéma et les jeux vidéo, avec une valeur économique de 151 milliards d’euros dans le monde. Un rapport du Syndicat National de l'Édition (SNE) en mars 2014 affirme que 70% des Français se considèrent comme des “lecteurs” - avec au moins un livre lu dans l’année en 2013. Quatre ans plus tard, la moyenne et de 20 livres - papier ou numérique - par an. Et cet accroissement n’en finit pas. Sans compter que plus de 60% des Français souhaiteraient consacrer plus de temps à la lecture.


Une nouvelle forme de lecture


Avec l’arrivée des e-books, et la popularité toujours plus importante des réseaux sociaux, la “vieille” passion des lecteurs a dû se mettre au goût du jour. D’autant plus que les jeunes aiment lire ! Une étude du Centre National du Livre (CNL) menée sur 1 500 personnes, âgées de 7 à 19 ans, explique qu’ils passent environs trois heures par semaine devant un livre. Néanmoins, les chiffres soulignent une légère baisse dans les foyers où l’usage d’Internet n’est pas contrôlé. Le web deviendrait donc un frein à la lecture ? Pas tout à fait.


Il existe des petites mains qui, derrière leur clavier, se servent de la visibilité des réseaux sociaux pour encourager les personnes à se tourner vers les livres. Si les lecteurs s’en vont, ils partiront à leur recherche. Un nouveau “cercle infini” de lectrices à lecteurs, traversant les frontières terrestres, et unissant des millions de personnes autour de la même passion. Toujours selon le CNL, “une lecture plus numérique [..] surtout chez les femmes” a été rendu possible car “elles sont [...] plus connectées aux réseaux sociaux et plus sensibles aux recommandations des internautes”.


“La lecture est une amitié” disait Marcel Proust


Vidéos, chroniques, photos… Tout est bon pour présenter une oeuvre sur son meilleur jour. Chacun peut donner son avis, quand et comme bon lui semble. Le “plafond de verre” entre lecteurs, écrivains et éditeurs se brise peu à peu pour ne laisser place qu’aux partages et à la création. Tout le monde, qu’importe sa classe sociale ou son âge, peut faire entendre sa voix.


"Ce qui empêche les gens de vivre ensemble, c’est leur connerie, pas leurs différences..." - Anna Gavalda, Ensemble, c’est tout.

Avec le développement du marché de l’auto-édition, des auteurs indépendants parviennent à toucher un large public. Vous voulez écrire ? Ecrivez ! Vous voulez lire ? Lisez ! C’est un retour aux sources du partage. La littérature n’est plus une activité solitaire, mais bien une passion réunissant des millions de personnes.


#Bookstagram : les photos, mais encore ?


La plateforme qui fait parler d’elle ces derniers temps, c’est instagram. Nouvelle vitrine pour les auteurs et les lecteurs, elle regroupe une communauté soudée - la communauté “bookstagram”. L’objectif ? Partager, grâce à l’impact de l’image, les lectures qui vont ont plus, déçue, la sortie que vous attendez le plus ou votre dernier roman. Avec près de vingt millions d'occurrences, le hashtag #Bookstagram en conquis plus d’un.


Loin de se prendre pour les nouveaux Pieter Claesz, les membres de la communauté utilisent leurs photos sans prétention comme une accroche efficace, un prétexte pour attirer l’attention avant de se plonger dans la lecture. Ils deviennent une vitrine, offrant l’accès le plus direct aux romans, et valorisant au passage le travail des graphistes - bien plus conséquent que choisir la nouvelle peinture de sa cuisine. Une mise en scène élaborée nous plongeant dans l’ambiance, un simple marque-page... Chacun sa marque, pourvu qu’on n’oublie pas le plus important : lire et s’évader.


Si on se posait moins de questions, et qu’on ré-apprenait à lire ?


Afin de comprendre un peu mieux les rouages de cet univers, intéressons-nous à ceux qui le composent.


Interview


Je souhaite d’abord remercier lafeegwenlan , Gally Lauteur, Clara Richter et Charline Rose pour avoir accepté de répondre à mes questions.


Depuis combien de temps es-tu sur Instagram ?


lafeegwenlan : Alors si je me fie à mon compte instagram, ma première photo date du 6 août 2014 et la première photo avec un livre date du 26 septembre 2014. Je pense que je peux dire que j’utilise Instagram depuis un petit moment maintenant et j’avoue que je suis devenue accro.

gally_lauteur : Je suis sur instagram depuis environ 2 ans.


Clara Richter : Depuis le printemps 2016, soit deux ans environ.


Charline Rose : J'ai créé mon compte il y a deux ans peut-être, mais j'y suis de manière régulière depuis un an et demi.


Qu’est-ce qui t’as donné envie de te lancer dans le domaine de la lecture sur cette plateforme en particulier ?


lafeegwenlan : Je suis une vraie book addict depuis que je suis une petite fille et lorsque j’ai lancé le blog lamalleauxlivres.com c’est naturellement que j’ai associé des réseaux sociaux et notamment instagram. J’avais cette envie et ce besoin de partager mes lectures avec des gens autour de moi car je n’avais pas de gros lecteurs dans mon entourage proche. De plus, Instagram est un réseau social très visuel et attractif.

gally_lauteur : J'y suis à la demande mes lectrices de wattpad qui n'avait ni Facebook ni Twitter.


Clara Richter : La proximité que l’on peut avoir avec les auteurs, et une certaine bienveillance de la communauté.


Charline Rose : En réalité, j'ai commencé par l'écriture. Avec la sortie de mon roman, j'ai échangé avec mes lecteurs et c'est en découvrant leurs comptes, que je me suis aperçue de l'ampleur de Bookstagram. J'ai trouvé que c'était vraiment génial et motivant de voir autant de monde graviter autour du monde du livre et de la lecture. A cette époque où on nous rabâche sans cesse que les nouvelles générations ne s'y intéressent plus...eh bien, je les invite à ouvrir un peu leurs yeux et leurs oreilles, et à découvrir tout ce qui se fait là dessus sur Instagram ou autre ! De là, j'ai décidé que je serai là en tant que romancière....mais aussi en tant que lectrice.


Qu’est-ce qui te plait dans cette aventure ? Qu’est-ce que tu en retires sur le plan personnel et/ou professionnel ?


lafeegwenlan : Sur le plan professionnel, rien du tout car je le fais pour mon plaisir et rien que cela. J’adore faire des nouvelles photos, faire des petites mises en scènes. C’est un vrai plaisir et un loisir de mettre en scène des livres qui m’ont plu ou que je vais découvrir prochainement.


Clara Richter : Instagram, pour les lecteurs (le fameux « bookstagram »), est avant tout une formidable source d’idées de lecture, foisonnante et sans cesse renouvelée, bien éloigné de l’idée stéréotypée, pleine de clichés navrants et genrés envers les lecteurs, qu’une journaliste peu inspirée a développée récemment. (insérer le lien vers l’article ?) Ce que je trouve formidable grâce à cette communauté, c’est que l’on peut saisir à quel point la lecture peut être diversifiée, et à contre-courant de certains stéréotypes. C’est un très bel exemple d’ouverture d’esprit et de tolérance pour les plus jeunes présents sur Instagram. Par exemple, on peut être un habitué de littérature générale mais apprécier une bonne comédie romantique. Aimer la romance mais se laissant tenter par de la BD ou du manga. Faire un détour par la littérature jeunesse qui regorge de pépites. Ou être un garçon et aimer la romance ! Instagram, c’est aussi cela : une multitude de postures de lecture, qui cohabitent, s’entrecroisent, et finalement, font de l’acte de lire une véritable fête, tantôt source d’acculturation, de réflexion, de détente ou de pansement à l’âme. Pour un auteur, Instagram est une communauté magnifique qui manifeste un enthousiasme et une ferveur incroyables. La communication et l’interaction auteur/lecteur est très facilitée, du fait que l’intuitivité de la plate-forme. Instagram est un outil que j’aime beaucoup pour cela. En tant que lectrice, je ne compte plus le nombre d’ouvrages que j’ai découvert (avec bonheur !) via bookstagram, grâce aux chroniques qui complètent (très souvent) les photos.


Charline Rose : L'échange, la passion du livre. Le fait que tout le monde puisse parler, sans frontière d'âge ou de pays, de son amour pour la lecture. Cette universalité, c'est comme la musique, ça rapproche les gens. Je ne suis pas particulièrement influencée par les posts de Bookstagram mais j'avoue que certains me donnent parfois envie de découvrir une histoire ou un auteur. Et puis étant une ancienne photographe, j'aime regarder des comptes qui sont vraiment très travaillés visuellement. Sur le plan personnel, je suis heureuse d'avoir autant d'échanges avec les bookstagrammers. C'est toujours très enrichissant. Chacun a évidemment sa personnalité, son univers, avec ses coups de cœur et ses coups de gueule. Sur le plan professionnel, ça m'apporte beaucoup pour mon premier tome. Des gens viennent me parler de leur ressenti et de leur envie de poursuivre l'aventure avec le tome 2.


Comment Instagram t'as aidé en tant qu'auteur ?


Clara Richter : La communauté joue un rôle non négligeable dans le lancement et le soutien d’un livre dont l’auteur est présent sur Instagram, c’est certain. Mais avant tout parce que c’est un plaisir de faire découvrir à la communauté toutes les phases de conception du livre, que ce soit de l’écriture en elle-même, jusqu’aux corrections, au travail éditorial et à l’impression. C’est un instant de partage très fort que l’on a avec les lecteurs et futurs lecteurs dans ces moments-là.


Charline Rose : Je vais lire régulièrement les critiques sur Edwenn et j'écris aussi souvent que possible en retour. C'est une plateforme très active : on a presque l'impression d'être à un salon et de discuter avec eux !

A quoi réfléchis-tu avant de prendre une photo ?


lafeegwenlan : Aujourd'hui la première chose à laquelle je pense, c’est la luminosité. Avant, ce n’était pas du tout ma préoccupation mais si je veux faire une jolie photo ( ou essayer ) c’est d’avoir une belle lumière de préférence naturelle. J’essaie ensuite de mettre en scène et de cadrer d’abord pour que ça me plaise et que ça plaise ensuite aux autres.


gally_lauteur : Je suis auteure plus que lectrice sur ce site donc je poste plutôt des extraits de mes livres ou les photos de mes livres que des lectrices m'envoient via insta. Je vois ça comme un moyen de communiquer entre nous.


Clara Richter : Je fais des photos au feeling, selon mon humeur. Je n’ai pas de « feed » très travaillé comme certains bookstragramers, même si j’aime ajouter quelques petits accessoires, piochés sur mes étagères, pour rendre la photo attractive !


Charline Rose : Parfois, je fais quelque chose de simple, faute d'inspiration ou de temps. Mais comme je veux absolument parler d'une lecture, je le fais quand même. Et parfois, j'ai vraiment l'idée d'une mise en scène, des objets qui accompagneront le livre, du décor, de l'ambiance. C'est quelque chose qui me plaît et me rappelle mon ancien travail de photographe.

D’après toi, qu’est-ce qu’apportes la dimension “photo”, par rapport à une chronique par exemple ?


lafeegwenlan : La dimension « Photo » est la première accroche. parfois des gens n’iront pas lire une chronique juste avec la photo de la couverture du livre. Mais parfois quand un roman est mis en scène et que la couverture nous interpelle on s’arrête et on va voir de plus près… Du coup on se dirige souvent ensuite vers des chroniques pour en savoir plus sur le livre et avoir l’avis d’autres lecteurs et lectrices. Pour moi c’est une sorte d’interpellation sur le livre. C’est un peu comme un libraire qui met un roman sur une table centrale ou en tête de gondole pour interpeller le lecteur ou la lectrice.


gally_lauteur : C'est très amusant et cela crée un lien plus direct. Beaucoup de lectrices m'envoient aussi des montages au sujet de les histoires et des critiques en tant que instabookeuse. J’aime l'idée que chacun peut partager son opinion sur un univers que j'ai créé. Comme je suis proche de mes lectrices, je prends leurs critiques constructives très au sérieux et j'adore l'idée de pouvoir leur répondre en direct. L'image de l'écrivain est parfois si inaccessible, je suis tout le contraire.


Clara Richter : L’attrait visuel a une dimension indéniable par rapport à une simple chronique. De la même manière qu’une maison d’éditions choisira de magnifiques couvertures de livres, très graphiques, très travaillées, pour porter son ouvrage, un bookstagramer aura envie de défendre et de faire découvrir sa lecture en jouant sur cet aspect visuel, et c’est pour moi tout sauf source de vacuité, tant cela sert l’acte de lire. En tant qu’enseignante, je suis très sensible à toutes ces initiatives qui développent l’envie de lire (bookstagram, booktube, blogosphère littéraire etc…).


Charline Rose : La photo est le commencement. Ce qui attire l'œil, comme la couverture d'un roman. Elle peut être une représentation de la chronique en quelque sorte. C'est un peu comme une bande annonce de film : la photo est un avant goût, une avant première de ce que l'on va découvrir et lire.


Est-ce qu’il t’arrive de participer à des challenges, des projets avec d’autres membres de la communauté ? Qu’est-ce que cela t’apportes ?


lafeegwenlan : Bien sûr, pas autant que je le souhaiterais car cela prend du temps et surtout il faut avoir l’inspiration. Néanmoins à Noël avec mon amie Sam du blog Sur l’étagère derrière la sirène en plastique, nous avons créer un calendrier de l’avent livresque en photo sur Instagram. Chaque jour, il y avait une petite consigne et les gens devaient prendre en photo un ou des livres en respectant celle-ci. C’était vraiment chouette et on a eu pas mal de participants. J’ai trouvé ça très ludique et amusant. En ce qui concerne, ce que cela m’apporte… C’est tout simplement le partage, l’échange. C’est aussi faire des nouvelles rencontres, découvrir de nouveaux livres.


Clara Richter : Non


Charline Rose : J'ai fait quelques challenges au début : le problème est le manque de temps ! Je n'arrivais jamais à les faire jusqu'au bout et pour le moment, j'ai arrêté. Avec les challenges, ce qui est intéressant, c'est qu'il faut toujours faire preuve d'imagination et de renouveau. C'est ça qui me plaisait. Chaque jour, je réfléchissais à ce que je devais faire pour le lendemain, tout en accomplissant ce que je devais faire pour le jour même ! Pour les projets : nous avons travaillé avec Lacarnum Inflamarae, à la création de bougies livresques sur le thème de mon roman Edwenn. Camille a un compte bookstagram, par lequel je l'ai connue, et un compte pour ses créations. Elle m'a proposé ce projet il y a quelques mois et nous avons tout choisi ensemble (visuel, couleurs, parfums...) en réfléchissant par rapport à l'ambiance de mon livre. C'était une expérience nouvelle. Un autre univers que je ne connaissais pas : en fait, je crois bien que depuis que je suis sur Bookstagram, je découvre pas mal de choses ! Et d'autres projets sont en cours, mais j'attends la sortie du tome 2. Il y aussi quelque chose que je renouvèlerai : c'est la lecture commune. Parler au fil des jours du même roman. Avoir des avis qui se rejoignent ou divergent. C'est un vrai moment de partage.

Est-ce que tu as des regrets vis-à-vis de cette aventure ? Des choses qui tu changerai si tu en avais l’occasion ?


lafeegwenlan : Aucun. Je pense qu’il faut profiter pleinement de cette aventure et ne pas avoir de regrets. Je n’ai pas plus honte de ce que je lis ou des photos que je fais. Tant que cela me plaît, je pense que c’est le principal. Tout comme le jour où je serais lassée ou je me sentirais obligée alors je m’arrêterai. Avant tout cela doit être du plaisir et un échange.


Clara Richter : Aucun. L’aspect chronophage, peut-être ! (mon compagnon pourrait vous en parler mieux que moi !)


Charline Rose : Aucun regret personnel. Peut-être que j'aimerais que certains comptes, qui sont vraiment travaillés et très beaux, soient plus connus. Il y aune vraie différence de réaction et de visibilité, alors que beaucoup de Bookstagrammers méritent leur place. C'est devenue une assez grosse machine qui écrasent parfois les plus petits.


Pour finir, aurais-tu une anecdote à nous raconter ? Une rencontre, un moment drôle ou émouvant que tu as vécu grâce à Instagram ?


lafeegwenlan : Rien ne me vient comme ça en tête mais j’ai fait des jolies rencontres via ce réseau social. De plus, je pense aussi que c’est un moyen d’être proche des autres lecteurs et lectrices mais aussi des auteurs et des maisons d’éditions. Néanmoins, je dirais qu’il faut aussi faire attention car sur Instagram, on montre seulement ce qu’on a envie de montrer et ce n’est pas toujours la vraie vie.


gally_lauteur : Je me souviens d'une lectrice qui m'a fait des vidéos de critiques en message privé pour me parler des démons de Cendrillon et de ses questions. C'était super marrant et ça m'a fait plaisir


Clara Richter : La rencontre avec les lectrices qui me suivaient sur Instagram, au détour d’une allée au dernier salon du livre à Paris, restera un moment très fort !


Charline Rose : C'est surtout en rapport avec mon roman. Je crois que tous les messages que je reçois des lecteurs sont des moments spéciaux pour moi. A chaque fois, je suis reboostée lorsqu'ils parlent avec enthousiaste d'Edwenn. Ça me redonne confiance en moi et en ma saga. Et je les remercie tous pour ça.


D’autres témoignages seront ajoutés plus tard, n’hésitez pas à me transmettre le vôtre !


Sources


(à corriger)

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